Digitalisation des entreprises : le (bon) exemple du monde judiciaire

#Productivité 29.07.2015 5min

Aujourd’hui, bien des professionnels partagent une même envie de réduire voire d’abandonner le support papier. En accompagnant une véritable stratégie de digitalisation, la dématérialisation gagne de nombreux secteurs, à l’instar des banques et assurances qui adoptent de plus en plus la signature électronique.

Cette digitalisation est loin de se résumer à un simple changement technologique. Si l’on en croit un rapport McKinsey publié en 2014 (« Accélérer la mutation numérique des entreprises »), elle peut exercer un impact direct sur le résultat opérationnel de l’entreprise : réussir sa transformation numérique entraînerait une hausse du résultat pouvant atteindre 40% ; à l’inverse, ne pas tirer profit des possibilités offertes par la digitalisation pourrait déboucher sur des baisses du résultat de 20%.

On comprend donc l’importance cruciale pour les entreprises d’engager la réflexion sur ces problématiques. En France, un secteur professionnel a justement été un véritable précurseur en matière de transformation numérique : le monde judiciaire.

Oodrive s’investit aux côtés des professionnels de la justice depuis de nombreuses années. Un engagement récompensé lors des Trophées Eurocloud 2015 où la société a reçu le « Trophée du meilleur service cloud marchés verticaux » pour Opalexe, plateforme de dématérialisation de l’expertise judiciaire.

Au cours d’un événement organisé dans ses locaux à l’occasion de la Cloud Week Paris, Oodrive a donné la parole à plusieurs figures proéminentes du monde judiciaire : Luc Ferrand, Directeur de Projet au Secrétariat Général du Ministère de la Justice ; Maître François Molinié, membre de l’Ordre des avocats au Conseil d’Etat et à la Cour de Cassation ; Maître Patrick Le Donne, Ancien Bâtonnier du barreau de Nice, Président de la commission NTIC du Conseil National des Barreaux (CNB) ; Didier Faury, Président du Conseil National des Compagnies d’Experts de Justice (CNCEJ) ; Maître Bernard Bailet, Président d’Infogreffe.

L’occasion de mieux comprendre quels ont été les obstacles au déploiement d’une justice dématérialisée et en quoi cette digitalisation a révolutionné les pratiques, aussi bien pour les professionnels eux-mêmes que pour les justiciables.

A travers l’exemple du monde judiciaire, toute entreprise peut aujourd’hui mieux appréhender les possibilités offertes par la dématérialisation et anticiper les freins que pose une telle transformation.

Dématérialiser ou périr ?

La dématérialisation représentait une étape indispensable pour les professions judiciaires, qui se heurtaient à de multiples obstacles.

Le traitement des procédures était long – La lourdeur administrative liée au support papier affectait toutes les professions judiciaires. Il fallait par exemple 15 jours pour obtenir un acte de commerce là où, aujourd’hui, sa délivrance est devenue instantanée. Pour récupérer les informations liées à une procédure en Cour de Cassation, les avocats devaient se rendre sur place ; désormais, les arrêts rendus sont directement mis en ligne sur les espaces sécurisés des avocats et il ne faut que quelques minutes pour les transmettre à l’ensemble des interlocuteurs.

Une pluralité d’acteurs – Chaque dossier implique des acteurs multiples et il est primordial de veiller à ce que chacun reçoive toutes les informations qui le concernent. Un manquement à ce principe peut être lourd de conséquences et entraîner dans certains cas la nullité des procédures.

Dans le cas des experts de justice par exemple, toutes les pièces d’un dossier doivent être transmises à toutes les parties, une obligation inscrite dans le code de procédure civile. Elle est d’autant plus complexe à respecter que les experts ne constituent pas une profession mais une activité pluridisciplinaire qui fédère des professionnels issus de différentes branches (médecins, géomètres, traducteurs-interprètes, etc). La dématérialisation permet cette mise à disposition globale et sécurisée des documents, se portant ainsi garante du respect de la loi.

Des exigences de sécurité strictes – On le sait, les données représentent pour toutes les entreprises leur bien le plus précieux et dans le cas du monde judiciaire, l’enjeu est d’autant plus capital qu’il s’agit d’un milieu très réglementé. C’est justement cette réglementation qui permet de garantir l’équité de la justice. A ce titre, reproduire des documents papier pouvait comporter des risques (pertes, oublis, etc) contre lesquels la dématérialisation permet de lutter. Les technologies requises permettent en effet de préserver la confidentialité et l’intégrité des échanges : à titre d’exemple, l’accès aux plateformes collaboratives utilisées par les professions judiciaires nécessite l’utilisation d’un certificat électronique afin de garantir l’identité de l’internaute.

Une répartition géographique disparate – Depuis la réforme de la carte judiciaire, de nombreuses juridictions ont disparu, créant parfois un éloignement géographique important entre les justiciables et leur juridiction de rattachement. Dématérialiser permet une réorganisation et une optimisation des échanges entre tribunaux et avocats.

Outre ces obstacles, le monde judiciaire devait aussi composer avec l’hétérogénéité des systèmes existants qui possédaient chacun leur propre organisation. Sans oublier un autre facteur qui concerne la plupart des professionnels confrontés à la problématique de la dématérialisation : la résistance au changement. La transformation numérique induit nécessairement des ruptures auxquelles chacun doit faire face, un cap psychologique pas toujours facile à franchir. Il paraît néanmoins inéluctable de lever ces blocages tant la dématérialisation s’inscrit dans le sens de l’histoire.

Une digitalisation à facettes

Aujourd’hui, la France est une véritable pionnière en matière de dématérialisation du monde judiciaire et a su lever la plupart des obstacles, en partie grâce à une véritable mobilisation des acteurs principaux de chaque profession et de la Chancellerie.

Les inquiétudes initiales relatives à la sécurité, au respect du secret des correspondances et à la traçabilité se sont apaisées. La dématérialisation entraîne même un effet paradoxal : comme elle suscite des craintes plus fortes que le papier sur la sécurité, on a finalement un niveau d’exigence bien plus important sur ces questions.

L’exemple du monde judiciaire illustre bien à quel point une digitalisation réussie doit prendre en compte plusieurs aspects, rappelés dans le rapport Lemoine sur la transformation de l’économie (2014) :

  • L’automatisation

    La transformation numérique permet de se recentrer sur son cœur de métier en évitant les pertes de temps liées aux tâches administratives : la productivité s’en trouve améliorée.

  • La dématérialisation elle-même

    Ce n’est pas une simple numérisation de documents, c’est la création d’une véritable plateforme de travail collaboratif sécurisé en ligne. Elle permet une meilleure interopérabilité car on crée un dispositif commun à plusieurs interlocuteurs qui utilisaient auparavant des systèmes disparates. Elle permet aussi de faciliter et de fluidifier les échanges.

  • La désintermédiation et la ré-intermédiation

    On place aujourd’hui de nouveaux acteurs au cœur de la relation entre les professionnels et leurs clients, un changement qu’il faut savoir organiser et accepter. A titre d’exemple, pour faciliter la mise en place de la plateforme Opalexe dédiée aux experts de justice, Oodrive a mis en place une véritable chaîne de confiance, en formant une soixantaine de représentants de terrain. Chacun a ensuite pour rôle d’identifier et de former des ambassadeurs au sein des équipes locales qui, à leur tour, peuvent ainsi venir en aide aux utilisateurs finaux. Une manière d’accompagner chacun dans cette indispensable modernisation.

Vous l’aurez compris, la digitalisation bénéficie autant à ceux qui la mettent en œuvre qu’aux usagers finaux.